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Le triptyque du développement des territoires en Afrique : L’Economie, le Digital et le bien-être de la Population – EDP

mercredi 7 février 2024

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Par Mounir ROCHDI

Aujourd’hui lorsque l’on souhaite développer un territoire, la méthode classique consiste à identifier les ressources qui y sont disponibles. Autrement dit qu’est ce qui est actuellement présent dans le territoire et qui permettrait de le développer rapidement. Cette approche classique se concentre principalement sur les ressources naturelles dont on pourrait disposer telles que le pétrole, le gaz naturel, les plages, les montagnes, les terres arables, les minerais, etc. Ce type d’approche peut être considérée comme du « Mono-Développement Durable ». En effet, dépendre d’une ressource naturelle unique représente, à long terme, un risque important sur le développement si cette première n’est pas correctement gérée. Par ailleurs cette dépendance peut limiter la créativité et les capacités d’innovation du territoire. Si l’on ajoute la dimension environnementale, cette approche Mono n’est plus durable. Un développement inclusif et durable doit compter sur une approche globale tant au niveau économique et sociale qu’au niveau environnemental.

1. L’approche Mono-Développement Durable

Après avoir identifié les ressources du territoire, deux options sont alors possibles : le territoire est peuplé ou il ne l’est pas. Supposons que le territoire soit peuplé et qu’il regorge de pétrole et ou du gaz naturel. Les revenus que vont générer ces produits vont être souvent et rapidement investi dans la construction d’immeubles de bureau, d’immeubles d’habitation haut standing ou encore de grandes rocades autour de la ville. Ces revenus vont relever aussi le niveau des salaires dans le territoire et attirer une expertise internationale. L’une des conséquences, sera l’augmentation du coût de la vie pour les populations locales. Un exemple qui représente parfaitement cette approche de mono-développement durable basée sur le pétrole est celui du Nigéria. Ce pays est devenu le Qatar de l’Afrique de l’Ouest en termes de revenu pétroliers. Cependant cette richesse n’a fait qu’aggraver les disparités dans le pays entre pauvres et riches. Selon l’institut de recherche World Poverty Clock, plus de 44 % des 180 millions d’habitants vit avec moins de 2 dollars par jour. A chaque minute qui s’écoule, six Nigérians basculent dans l’extrême pauvreté. Alors que le Nigeria est le premier producteur d’or noir en Afrique, avec environ 2 millions de barils exportés chaque jour.

Un deuxième exemple de Mono-Développement durable est celui basé sur le tourisme. Le Cap-Vert, archipel perdu au large du Sénégal, a misé depuis plusieurs années sur le tourisme pour développer son économie et réduire la pauvreté. Il affiche d’ailleurs depuis vingt ans l’une des meilleures progressions dans la lutte contre la pauvreté. Ce développement s’est fait cependant au détriment de la protection de l’environnement et ne bénéficie pas à tous les territoires de l’archipel. Près de 90 % des touristes prennent des séjours « all inclusive » dans des luxueux hôtels et plus de la moitié d’entre eux atterrissent dans la seule île de Sal. Tous ces touristes ont le droit par jour à une bouteille en plastique d’eau potable. En effet les problèmes d’eau potable sur l’île obligent les hôteliers à fournir leurs visiteurs en bouteille d’eau. Résultat, une grande masse de déchets plastiques qu’il faut collecter, traiter et recycler. Conscient de ce problème, le Cap Vert tente de développer d’autres approches touristiques plus responsables.

Les deux exemples cités ne sont malheureusement pas une exception. L’élément manquant dans ces deux cas est celui de l’anticipation. Ce n’est pas parce que le territoire possède du pétrole ou des atouts touristiques qu’il faut sauter sur l’occasion et développer à pleine vitesse. Il faut étudier les conséquences de l’approche de développement choisie à long terme afin de s’assurer de sa durabilité économique, sociale et environnementale.

Le développement du territoire se fait parfois de manière hâtive car le premier retour sur investissement escompté est celui de la création d’emploi. Ce nouveau marché de travail permet de faire tourner l’économie locale, de générer des revenus fiscaux ainsi que d’assurer des revenus aux familles.

Il faut peupler un territoire pour accompagner son développement. Des projets de constructions et d’aménagement sont ainsi entrepris pour construire des écoles, des hôpitaux, des routes, des lieux de cultes, des lieux de loisirs. Mais souvent les grands perdants dans cette approche sont les transports en commun obligeant ainsi la population qui souhaite s’y installer de devoir posséder une voiture. La discrimination territoriale commencerait ainsi avant même que le territoire ne soit peuplé et créera dès le départ une disparité liée au transport et à l’autonomie de déplacement. Tel est le résultat d’une approche Mono-Développement Durable.

2. Créer l’opportunité pour développer le territoire

Il est donc nécessaire d’adopter une nouvelle approche plus durable pour le développement des territoires et qui prend en compte le volet économique, culturel, environnemental et humain. Cette approche s’appliquera même aux territoires ne possédant pas de ressources naturelles. Ce dernier point est parfaitement illustré à l’Ile Maurice. Ce petite territoire insulaire d’1,3 million d’habitants est devenu une référence en ce qui concerne les développements informatiques. Alors que les indices convergeaient tous vers un développement axé principalement sur l’attractivité touristique de cette île, les autorités ont créé une nouvelle opportunité de développement axée sur la sous-traitance informatique. Cette stratégie, mise en œuvre sur plusieurs années, permet aujourd’hui à l’Ile Maurice d’attirer des projets informatiques de grandes envergures.

Un autre exemple est celui de la Turquie qui est devenu un centre mondial pour la greffe de cheveux avec un chiffre d’affaires 2019 de plus d’un milliard de dollars, selon le Conseil turc des relations économiques internationales (DEIK). Ce chiffre devrait dépasser les 50 milliards de dollars à l’horizon 2028, selon l’étude du Data Bridge Market Research. Le pays a mis en place une stratégie pour le placer dans le tourisme médical mondial de la greffe de cheveux.

Un dernier exemple est celui des secteurs aéronautique et automobile au Maroc. Le royaume occupe, aujourd’hui, une place majeure dans ces deux secteurs. En 20 ans, 140 entreprises spécialisées dans le secteur aéronautique se sont implantées au Maroc créant ainsi 16700 emplois directs.

L’objectif de ces stratégies de développement est la diversification économique pour ne plus dépendre uniquement des ressources naturelles. Les cours du pétrole ou de gaz peuvent drastiquement chuter. Ces produits peuvent tout simplement s’épuiser aussi. Les paysages paradisiaques peuvent être victimes de tempêtes violentes ou de Tsunami et les ressources minières ne sont pas illimitées non plus. Pour mieux accompagner le développement d’un territoire et ne plus se baser sur une approche mono-développement durable il faudrait avoir une approche triptyque axée sur l’Economie, sur le Digital et centrée principalement sur le bien-être de la Population.

3. L’approche triptyque EDP du développement des territoires

L’Economie, le Digital et le bien-être de la Population (EDP) représente un triptyque nécessaire pour un développement inclusif et durable du territoire.

3.1 Le bien-être de la population
Dans un territoire, chaque citoyen a des besoins de bases qui sont la santé, l’enseignement, l’emploi et la sécurité. Ils représentent les besoins primaires de tout citoyen dans le monde.

a) La santé
Des hôpitaux opérationnels, un personnel de santé compétent et disponible, des urgences efficaces, la disponibilité du matériel médical, une bonne prise en charge hospitalière et la possibilité d’accéder à des soins de qualité représentent un besoin vital pour chaque citoyen. Ce dernier souhaite s’assurer que les autorités sanitaires veillent sur lui et le prendront en charge lorsqu’il en aura besoin. Ce besoin est proportionnel au risque auquel il fait face. Plus le citoyen est dans une situation d’urgence sanitaire élevée, plus son niveau de satisfaction sera élevé face à sa prise en charge rapide et efficace.
Un premier pas vers l’amélioration a déjà été franchi dans certains pays Africains avec la mise en place de la couverture maladie universelle. Reste maintenant à continuer sur les efforts tant au niveau matériel qu’au niveau formation et accès aux soins.

b) L’éducation
Une école publique rigoureuse, un corps enseignant motivé et engagé, un programme d’éducation pour développer l’employabilité des jeunes et faciliter leur insertion professionnelle, des filières de formation d’avenir et une école accessible à tous. Chaque citoyen cherche à ce que ses enfants puissent bénéficier d’un enseignement leur permettant de mieux appréhender leurs avenirs.

Dans plusieurs pays Africains, l’enseignement privée a pris le dessus sur l’enseignement public devenant ainsi incontournable même pour les bourses modestes. Cela va à l’encontre des égalités des chances quel que soit le niveau brillant de l’enfant. En effet l’intelligence n’est pas proportionnelle à la richesse matérielle. Mais cette dernière peut la renforcer lorsque la première est présente.
Selon l’UNESCO, la continent Africain a enregistré un taux d’inscription à l’école primaire de 80% en moyenne. Ce taux est le plus élevé des dernières décennies. Cependant et selon l’Union Africaine, cette augmentation rapide des inscriptions masque d’énormes disparités et des dysfonctionnements du système dans des sous-secteurs de l’éducation tels que l’enseignement maternelle, technique, professionnel et informel, qui sont sévèrement sous-développés.

Ayodele Odusola, la rédactrice en chef du rapport intitulé « Inégalités de revenus en Afrique subsaharienne. Tendances divergentes, déterminants et conséquences (1) » et Chef Economiste au PNUD, a déclaré : « Une éducation de qualité est essentielle à la mobilité sociale et peut donc contribuer à réduire la pauvreté, même si elle ne réduit pas nécessairement les inégalités [de revenus] ».

c) L’emploi
Selon le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEP), La jeunesse africaine reste la plus touchée, dans le monde, par le chômage. Un tiers des 420 millions de jeunes africains âgés de 15 à 35 ans sont au chômage. De ce nombre, 35 % ont un emploi précaire et 19 % sont inactifs. Par ailleurs, dans de nombreux pays Africains, la majorité des 82% des travailleurs, déjà concentrés dans le secteur informel, sont considérés comme travailleur pauvre. Ce qui représente pour eux une double peine dans l’emploi. S’ajoute à cela les inégalités et la discrimination liés au genre. La clé de l’emploi dans un territoire est l’employabilité de sa population afin de correspondre à l’offre actuelle et surtout futur du marché de travail.

d) La sécurité
Il n’est pas question ici que de sécurité physique au sens stricte du terme, mais plutôt de sécurité plus globale. Ce fameux sentiment de sécurité. Chaque citoyen souhaite se déplacer sereinement, sortir paisiblement, dormir tranquillement, travailler durablement et compter sur les services publics lorsqu’il en a besoin. Au-delà de la peur qu’il peut générer, le sentiment d’insécurité a un impact aussi social qu’économique. Un terroir dans lequel règne l’insécurité ne favorisera ni les investissements, ni le peuplement, ni l’innovation et encore moins la compétitivité.

Le bien-être de la population est bien illustré par le baromètre « The Global Liveability Index » qui est réalisé chaque année par The Economist Intelligence Unit (The EIU), la division recherche et analyse de The Economist Group, qui détient le journal du même titre. Ce baromètre annuel classe les villes où il fait bon de vivre. Pour son édition de 2023, The EIU a passé au crible 172 villes du monde selon des critères économiques, sociaux, environnementaux, sanitaires et culturels.
Dans ce baromètre 2023 et contrairement à ce que l’on pourrait croire, seules deux villes de l’Union Européenne sont présentes dans le top 10. En effet la ville de Vienne (Autriche) décroche la première place et la ville de Copenhague (Danemark) la talonne en deuxième place.

C’est l’Australie, le Canada et la Suisse, qui sont les grands gagnants de ce palmarès puisqu’ils sont tous les trois présents dans le top 10 avec plusieurs villes. Pour l’Australie, nous retrouvons Melbourne 3ème, Sydney 4ème ; Pour le Canada il y a Vancouver 5ème, Calgary 7ème, Toronto 9ème ; Pour la Suisse, Zurich est en 6ème place, et Genève en 7ème. Le grand absent de ce Top 10 sont les Etats-Unis d’Amérique.
Quant aux pays Africains ils se retrouvent tous bien loin dans le classement. Pire encore, 5 pays Africains se retrouvent dans les Top 10 des pires villes dans le monde.

Pour comprendre ce mauvais classement des pays Africains, il faut analyser la méthode utilisée par The EIU pour réaliser son étude.
Chaque ville est notée sur la base de 5 critères et dans chaque critère il y a des indicateurs qui sont utilisés :

Catégorie 1 : Stabilité (25% du score)
Indicateurs utilisés et leur source
- Prévalence de la petite délinquance (indice EIU)
- Prévalence des crimes violents (indice EIU)
- Menace terroriste (indice EIU)
- Menace de conflit militaire (indice EIU)
- Menace de troubles civils ou de conflits (indice EIU)

Catégorie 2 : Soins de santé (20% du score)
Indicateurs utilisés et leur source
- Disponibilité des soins privés (indice EIU)
- Qualité des soins privés (indice EIU)
- Disponibilité des soins publics (indice EIU)
- Qualité des soins publics (indice EIU)
- Disponibilité des médicaments en vente libre (indice EIU)
- Indicateurs généraux de santé (indice adapté de la Banque Mondiale)

Catégorie 3 : Culture et Environnement (25% du score)
Indicateurs utilisés et leur source
- Humidité / Température (Indice adapté des conditions météorologiques moyennes)
- Inconfort du climat pour les voyageurs (indice EIU)
- Niveau de corruption (indice adapté de Transparency International)
- Restrictions sociales ou religieuses (indice EIU)
- Niveau de censure (indice EIU)
- Disponibilité sportive - infrastructures et activités - (indice EIU basé sur 3 indicateurs sportifs)
- Disponibilité culturelle - infrastructures et activités - (indice EIU basé sur 4 indicateurs culturels)
- Alimentation et boissons (indice EIU basé sur 4 indicateurs culturels)
- Biens et services de consommation (indice EIU basé sur la disponibilité des produits)

Catégorie 4 : Education (10% du score)
Indicateurs utilisés et leur source
- Disponibilité d’un enseignement privé (indice EIU)
- Qualité de l’enseignement privé (indice EIU)
- Indicateurs sur l’enseignement public (indice adapté de la Banque Mondiale)

Catégorie 5 : Infrastructure (20% du score)
Indicateurs utilisés et leur source
- Qualité du réseau routier (indice EIU)
- Qualité des transports publics (indice EIU)
- Qualité des liaisons internationales (indice EIU)
- Disponibilité d’un logement de bonne qualité (indice EIU)
- Qualité de fourniture en énergie (indice EIU)
- Qualité de fourniture en eau (indice EIU)
- Qualité des télécommunications (indice EIU)

Même si la plupart des pays Africains sont connus pour leurs climats tempérés, agréables à vivre et que la population Africaine est reconnue pour son hospitalité légendaire et son accueil, ce qui pousse les villes Africaines vers le bas du classement du Global Liveability Index 2023 sont majoritairement le manque d’infrastructures durables, un système de santé déficient et un système éducatif dépassé et surchargé.
Nous revenons ainsi à la nécessité d’assurer les besoins primaires d’un citoyen dans le cadre de l’approche triptyque EDP pour développer un territoire.

3.2 La dimension économique
Le développement économique régionale nécessite une réelle synergie entre les différents acteurs territoriaux : Etat, collectivités territoriales, entreprises, associations civiles, universités, etc. Il faut en effet une approche basée sur l’Intelligence Collective pour voir le territoire dans sa globalité incluant le niveau régional, national et même international.

La première action à entreprendre sera de réaliser un audit sectoriel et territorial pour établir un diagnostic et des recommandations. Cet audit permettra de répondre aux questions sur les ressources, les opportunités, le capital humain et la formation, la santé, les services aux citoyens, l’infrastructure, le bien être. Les questions dépendent bien évidement de chaque territoire et sont reliées les unes aux autres. Elles devront aussi faire l’objet d’un Benchmark avec des territoires équivalents.

- Les ressources : de quelles ressources dispose-t-on ? Ressources naturelles ou non. Sont-elles exploitables ? Disposons-nous des conditions nécessaires pour les exploiter ? Quels impacts environnemental, social et économique à long terme ? Quel impact local, régional, national, international ?...

- Les opportunités. Au-delà des ressources dont le territoire pourrait disposer ou non, y-a-t-il des opportunités à créer ? Le territoire pourrait-il se positionner sur un domaine d’avenir particulier ? Comment pourrait-on se positionner dans la chaine de valeur mondiale ? Quelles attractivités mettre en place pour le territoire ?...

- Le capital humain et la formation. Quels types de populations peuplent le territoire (actifs, non actifs, jeunes, genre, etc.) ? Quelles sont les qualifications de la population actuelle ? Quelle sont les formations assurées sur le territoire et quelles sont les retours sur investissements ? Faut-il mettre en place de nouvelles filières de formation ? Quelle est la mobilité de la population et les raisons à cela (peuplement, désertification) ?...

- La santé. Quelle est l’offre de santé actuellement disponible sur le territoire ? Est-ce qu’elle réponde aux types de populations actuelles ? Quels types de maladies sont présentes sur le territoire (saisonnières, chroniques) ? Quel est l’Etat de santé de la population ? Quel est l’impact de l’environnement sur la santé ?

- Les services aux citoyens. Les services assurés aux citoyens répondent-ils à leurs besoins ? Y a-t-il de nouveaux services à mettre en place ? La manière dont les services sont fournis doit-elle être modifiée ?

- L’infrastructure. De quelle infrastructure dispose-ton (routière, aéroportuaire, industrielle, touristique, sanitaire, éducative, habitations, loisirs, etc.) ? Quel est leur état ? Le territoire dispose-t-il d’une politique qui favorise les transports en commun ? Quels sont les nouveaux besoins ? Comment anticiper sur la saturation des infrastructures actuelles ?...

- Le bien être : la population dispose-t-elle des structures primaires pour son bien être ? (Hôpital, école, espace vert, cinéma, activités culturelles, associations, commerces, bibliothèques, lieux de cultes, etc.) Ces structures sont-elles accessibles et durables ? Le niveau de sécurité de la population est-il optimal ? Les services de police, des urgences, des pompiers sont-ils totalement opérationnels ? Comment peut-on améliorer le bien-être de la population ?...

Le développement économique d’un territoire met forcément en évidence celui de l’emploi. Mais plus que l’emploi lui-même, l’employabilité est un atout majeur dans le développement d’un territoire. Ce dernier n’est pas riche seulement par son économie mais surtout par sa population. Pour illustrer la réalité de cette richesse, il suffit de voir l’état des territoires, auparavant miniers, et qui ont connus la fermeture de leurs mines. Dépendant majoritairement des revenus de leurs mines qui faisaient d’ailleurs travailler la majeure partie de la population du territoire, ces régions se sont retrouvées désertées du jour au lendemain après les fermetures des mines.
Un territoire doit prendre en compte la nécessaire adéquation entre formation et marché du travail y compris ses évolutions. Ce dernier point sera bien illustré au niveau de la dimension Digitale.

3.3 La transition Digital
Les outils numériques transforment les services publics et la façon dont les gouvernements répondent aux besoins des citoyens. De nombreux territoires se sont activement engagées dans un processus de transformation digitale des services gouvernementaux. Cependant, les territoires sont confrontés à de nombreux défis dans les processus de transformation numérique, y compris repenser la gouvernance, allouer des ressources pour la requalification et l’adoption de nouvelles technologies, ainsi que les questions législatives et politiques. Il ne suffit pas de lancer un service numérique pour que cela réponde aux besoins des citoyens. Il faut comprendre l’usage du citoyen pour que le service digital puisse s’adapter à ses habitudes. Ce n’est pas au citoyen de s’adapter au service numérique c’est l’inverse qui doit se faire.

Le citoyen Africain est à la recherche de plus de transparence, de réactivité et de simplicité dans les services publiques auxquels il a accès. Un service numérique doit donc apporter une réponse à ces trois attentes en plus d’assurer efficacement la délivrance du besoin initial du service demandé. Sinon le service ne sera pas utilisé et ne fera que renforcer la frustration du citoyen vis-à-vis des services publics.
Avec 4,2 milliards d’habitant Africains en 2100 selon l’ONU et la planète terre n’étant pas extensible, l’Afrique est obligée d’adapter ses territoires à cette contrainte démographique forte et de s’assurer du bien-être de sa population. Cela pourrait aussi se faire à travers les villes intelligentes. C’est en tout cas l’objectif de l’approche de la ville de Kigali au Rwanda.

La capitale Rwandaise a entrepris des initiatives pour devenir plus intelligente.

- Transports : en 2021, la ville a lancé avec l’entreprise GURARIDE, un système de transport public par vélos intelligents, scooters et vélos électriques libre-service.
Un système nommé « Tap & Go » a permis de dématérialiser tous les paiements des trajets en bus grâce à une carte de paiement rechargeable dans tous les arrêts de bus. Ce système, a permis aux autorités locales de collecter des informations sur le nombre de personnes utilisant les transports en commun, le nombre de trajets qu’ils effectuent par jour. L’analyse de ces données collectées permet d’améliorer la gestion des files d’attente pour le paiement des tickets et accélère la montée dans les bus.

- Gestion des déchets : en 2021, Kigali a introduit une stratégie de Smart Waste Management Strategy (Gestion intelligente des déchets), pour collecter des données sur la production, la collecte et le traitement des déchets. Par exemple, les anciennes poubelles de la capitale rwandaise ont été remplacées par des poubelles intelligentes équipées de capteurs. Cet équipement permet la surveillance en temps réel du remplissage des déchets afin de réguler la collecte des déchets sur le terrain.

- Éclairage public : La ville a entrepris des projets d’éclairage public intelligent pour améliorer la sécurité dans les rues et les quartiers. Les lampadaires équipés de capteurs, ajustent automatiquement l’éclairage en fonction de la luminosité ambiante.

- Santé : le gouvernement a déployé en février 2023, des drones pour livrer des médicaments aux diabétiques vivant dans les zones éloignées.

Conclusion
Le territoire est un ensemble complexe qu’il faut analyser, comprendre et accompagner. Situé dans un environnement national mais évoluant dans un contexte international, il doit sans cesse se repositionner, se réadapter et anticiper sur son avenir. Cette agilité reposera sur le triptyque Economie, Digitale et bien être de la Population EDP dont les dimensions sont totalement imbriquées les unes dans les autres et ne peuvent être mises en œuvre sans approche collective qui prendrait en compte le triptyque dans sa globalité.

(1) https://www.africa.undp.org/content/rba/en/home/library/reports/income-inequality-trends-in-sub-saharan-africa--divergence--dete.html